The Electric State : le blockbuster Netflix qui divise la critique

the electric state

Sorti le 14 mars 2025 sur Netflix, « The Electric State » des frères Russo s’impose comme le film le plus coûteux jamais produit par la plateforme avec un budget estimé à 320 millions de dollars. Cette adaptation du roman graphique de Simon Stålenhag nous plonge dans une Amérique alternative des années 90, ravagée par une guerre entre humains et robots, où Millie Bobby Brown incarne une adolescente partie à la recherche de son frère disparu.

The Electric State | Bande-annonce officielle VF | Netflix FranceThe Electric State | Bande-annonce officielle VF | Netflix France

Un univers dystopique ambitieux

L’intrigue se déroule dans une version alternative de 1994, après une guerre civile dévastatrice entre humains et robots. Ces derniers, créés à l’origine par Walt Disney dans les années 50 comme assistants spécialisés pour diverses tâches quotidiennes, ont développé une conscience et revendiqué leur liberté, déclenchant un conflit majeur.

Le film s’ouvre sur des scènes décalées montrant Bill Clinton signant un traité de paix avec Mr. Peanut (interprété par Woody Harrelson), le leader des robots. Suite à leur défaite, les robots survivants sont confinés dans une immense zone d’exclusion de 100 000 miles carrés dans le désert du sud-ouest américain, tandis que l’humanité sombre dans une addiction aux « neurocasters » , des casques de réalité virtuelle développés par le magnat de la technologie Ethan Skate (Stanley Tucci).

Un casting de stars sous-exploité

Millie Bobby Brown (Stranger Things) incarne Michelle, une adolescente orpheline qui a perdu ses parents et son frère prodige Christopher (Woody Norman) dans un accident de voiture. Sa vie bascule lorsqu’un robot ressemblant au personnage de dessin animé préféré de son frère, Cosmo, apparaît et lui fait comprendre que la conscience de Christopher pourrait être emprisonnée quelque part.

Pour retrouver son frère, Michelle s’allie avec John Keats (Chris Pratt), un ancien soldat devenu contrebandier, accompagné de son fidèle robot Herman (voix d’Anthony Mackie). Ensemble, ils doivent pénétrer dans la Zone d’Exclusion tout en échappant aux drones militaires commandés par le Colonel Marshall Bradbury (Giancarlo Esposito), un héros de guerre obsédé par la destruction des robots.

Le film réunit un impressionnant casting qui inclut également :

  • Ke Huy Quan (Everything Everywhere All at Once) dans le rôle du Dr. Amherst
  • Stanley Tucci en tant qu’Ethan Skate, le milliardaire de la tech
  • Jason Alexander comme Ted, le tuteur abusif de Michelle
  • Brian Cox, Jenny Slate et Alan Tudyk prêtant leurs voix à divers robots

Une adaptation qui s’éloigne de l’œuvre originale

Les fans du roman graphique de Simon Stålenhag risquent d’être désorientés par les choix créatifs des frères Russo. Là où l’œuvre originale proposait une narration elliptique et mélancolique avec une palette de couleurs tamisées, le film opte pour une approche beaucoup plus conventionnelle et spectaculaire.

Cette différence fondamentale de ton constitue l’un des principaux reproches adressés au film. Comme le souligne la critique du New York Times, « Pour ceux qui cherchent une adaptation plus fidèle de l’univers de Stålenhag, la série Prime ‘Tales From The Loop’ offre une interprétation plus méritante » .

Un message sur notre relation à la technologie

Malgré ces écarts avec l’œuvre originale, le film tente d’explorer des thèmes contemporains pertinents. Selon Joe Russo, « Le film parle de notre relation paradoxale avec la technologie… il y a une véritable connexion humaine que vous pouvez trouver dans la technologie, mais vous pouvez aussi trouver l’inverse ».

Cette réflexion se manifeste à travers les « neurocasters », ces casques de réalité virtuelle qui plongent leurs utilisateurs dans un état catatonique, complètement déconnectés du monde réel. Une métaphore à peine voilée de notre propre dépendance aux écrans et aux réseaux sociaux.

Une prouesse technique au service d’un scénario contesté

Si les critiques sont divisées sur le fond, elles s’accordent généralement sur la qualité technique du film. Les effets spéciaux, notamment la façon dont les personnages robotiques semblent occuper l’espace réel aux côtés des acteurs en chair et en os, sont unanimement salués.

Cependant, cette excellence technique contraste avec un scénario jugé prévisible et superficiel. Rolling Stone déplore que « le film adhère à la même formule prévisible que d’innombrables autres récits de quête. Les explosions et le chaos s’enchaînent, tandis que des sélections musicales vintage visent à évoquer la nostalgie ou à servir de faible méta-commentaire ».

Cette critique pointe du doigt l’un des aspects les plus controversés du film : son utilisation de références nostalgiques aux années 90 qui semblent souvent forcées et artificielles, comme lorsque « Good Vibrations » de Marky Mark and the Funky Bunch est utilisée uniquement pour mettre en place une blague.

Un positionnement stratégique pour Netflix

Avec son budget colossal de 320 millions de dollars (non confirmé officiellement par Netflix mais rapporté par plusieurs médias américains), « The Electric State » représente un investissement majeur pour la plateforme de streaming. Ce montant en ferait non seulement le film le plus cher produit par Netflix, mais aussi l’un des films les plus coûteux de l’histoire du cinéma.

Cette stratégie s’inscrit dans la volonté de Netflix de concurrencer les grands studios traditionnels sur le terrain des blockbusters à grand spectacle. Après « The Gray Man » (2022), également réalisé par les frères Russo, la plateforme continue de miser sur des productions ambitieuses capables d’attirer un large public international.

Un film qui divise profondément la critique

Les réactions au film sont extrêmement polarisées. D’un côté, certains critiques saluent l’ambition visuelle et le divertissement pur offert par cette superproduction. De l’autre, de nombreuses voix dénoncent un film qui synthétise « les pires tendances du travail des frères Russo pour le MCU, y compris des expositions laborieuses qui ralentissent le rythme, des personnages superficiels, des références musicales pavloviennes, et des éclats de sarcasme logés comme des éclats d’obus dans une épaisse boue toxique de sentimentalité ».

Cette division reflète peut-être les deux façons d’aborder le film évoquées par AVForums : soit comme un amateur de science-fiction exigeant, nourri aux classiques comme « Blade Runner » ou « A.I. » , soit comme un spectateur plus occasionnel cherchant un simple divertissement spectaculaire.

Une adaptation trop formatée

Ce qui ressort également de l’analyse des critiques, c’est le sentiment d’une occasion manquée. Le roman graphique de Stålenhag offrait une vision unique, contemplative et profondément mélancolique d’un monde post-apocalyptique. En transformant cette œuvre en blockbuster formaté, les frères Russo semblent avoir sacrifié ce qui faisait la singularité et la force de l’œuvre originale.

Comme le souligne la critique du New York Times, l’œuvre originale « laisse le lecteur avec un puissant sentiment de deuil et de chagrin pour ce que nous, en tant qu’espèce, avons provoqué ». Cette dimension philosophique et émotionnelle semble largement diluée dans l’adaptation cinématographique au profit d’une formule plus conventionnelle et commerciale.

Cette transformation soulève des questions plus larges sur l’industrie du streaming et sa tendance à homogénéiser les contenus, même les plus singuliers, pour les faire entrer dans des moules préétablis censés plaire au plus grand nombre. Un paradoxe à l’heure où les plateformes affirment justement offrir une alternative plus diversifiée aux productions traditionnelles d’Hollywood.

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