Avec Mickey 17, le réalisateur oscarisé Bong Joon-ho livre une œuvre de science-fiction audacieuse et profondément humaine. Robert Pattinson y incarne un clone jetable dans un futur dystopique, questionnant notre rapport à l’identité et à la mort.
Sommaire
Un concept de clonage révolutionnaire
Mickey 17 se déroule en 2054, dans un contexte de colonisation spatiale. Robert Pattinson y interprète Mickey Barnes, un « remplaçable » – un être humain sacrifiable dont la mémoire et le corps peuvent être sauvegardés puis réimprimés à l’infini. Cette prémisse fascinante permet à Bong Joon-ho d’explorer les implications éthiques et philosophiques du clonage à grande échelle.
Le film s’ouvre sur la 17e version de Mickey, coincée au fond d’une crevasse sur une planète glaciale. Cette scène d’introduction, à la fois glaçante et absurde, donne immédiatement le ton de l’œuvre : un mélange unique d’humour noir et de réflexion existentielle.
L’absurdité comme vecteur de critique sociale
Fidèle à son style, Bong Joon-ho utilise l’absurde pour dénoncer les travers de notre société. La banalisation de la mort dans ce futur dystopique fait écho à notre propre désensibilisation face à la violence. Le réalisateur pousse le concept à l’extrême, montrant comment le corps de Mickey est recyclé, moqué, ou utilisé comme cobaye.
Cette approche permet une critique acerbe du capitalisme et de l’exploitation humaine. Le personnage de Kenneth Marshall, interprété par Mark Ruffalo, incarne parfaitement cette satire. Autocrate à la tête de l’expédition spatiale, il est décrit comme une « parodie outrancière de Trump« , avec ses dents trop blanches et son mépris pour la vie humaine.
Robert Pattinson : une performance aux multiples facettes
L’acteur britannique livre ici l’une de ses performances les plus complexes à ce jour. Loin de son image de star de Twilight, Robert Pattinson embrasse pleinement l’excentricité du personnage de Mickey. Sa voix nasillarde et sa gaucherie contrastent avec son charisme habituel, démontrant une fois de plus sa capacité à prendre des risques.
La dualité du rôle – Robert Pattinson incarnant à la fois Mickey 17 et Mickey 18 – offre un terrain de jeu fascinant pour l’acteur. Il parvient à insuffler une personnalité distincte à chaque version du clone, tout en maintenant un lien subtil entre elles. Cette performance en miroir soulève des questions profondes sur la nature de l’identité et de la conscience.
Une esthétique visuelle entre futurisme et désolation
Bong Joon-ho, connu pour son sens aigu du cadrage et de la composition, ne déçoit pas avec Mickey 17. Le film oscille entre deux esthétiques distinctes :
- Les scènes à bord du vaisseau spatial, cliniques et aseptisées, évoquant un futur high-tech
- Les séquences sur la planète glaciale, âpres et désolées, rappelant les westerns post-apocalyptiques
Cette dualité visuelle renforce le propos du film sur le contraste entre progrès technologique et régression morale. Les effets spéciaux, notamment dans les scènes de « réimpression » de Mickey, sont à la fois impressionnants et dérangeants, servant parfaitement le propos du film.
Un commentaire politique d’une brûlante actualité
Bien que se déroulant dans un futur lointain, Mickey 17 n’en demeure pas moins un commentaire acerbe sur notre époque. Le film aborde des thèmes d’une actualité brûlante :
- L’exploitation des plus vulnérables par les élites
- Les dérives potentielles des avancées scientifiques
- La déshumanisation induite par le capitalisme extrême
La décision de Warner Bros de repousser la sortie du film après les élections américaines prend tout son sens à la lumière de ces éléments. Mickey 17 s’inscrit dans la lignée des œuvres de science-fiction engagées, utilisant un cadre futuriste pour mieux décrypter les enjeux de notre présent.
Bong Joon-ho : l’art du mélange des genres
Avec Mickey 17, le réalisateur sud-coréen confirme son statut de maître dans l’art du mélange des genres. Le film navigue habilement entre :
- La comédie noire
- Le drame existentiel
- Le thriller de science-fiction
- La satire politique
Cette alchimie complexe pourrait dérouter certains spectateurs, mais elle constitue la signature unique de Bong Joon-ho. Comme dans Parasite ou Snowpiercer, le réalisateur parvient à maintenir un équilibre précaire entre ces différents tons, créant une expérience cinématographique aussi divertissante qu’intellectuellement stimulante.
Un film qui transcende les frontières du genre
Mickey 17 s’impose comme bien plus qu’un simple film de science-fiction. Il s’agit d’une œuvre profondément humaniste, qui utilise les codes du genre pour mieux les transcender. En questionnant notre rapport à l’identité, à la mort et à l’éthique, Bong Joon-ho livre un film qui résonnera longtemps après le générique final.
Avec sa mise en scène virtuose, ses performances d’acteurs remarquables et son propos d’une pertinence aiguë, Mickey 17 s’annonce d’ores et déjà comme l’un des films majeurs de 2025. Il confirme, s’il en était encore besoin, que Bong Joon-ho est l’un des cinéastes les plus importants et novateurs de sa génération.
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